Afrique : vérifier les faits, une exigence

La forte pénétration du téléphone mobile sur le continent africain* y a facilité le développement des médias sociaux. Au Kenya comme dans d’autres pays, les « fake news » ou fausses nouvelles se multiplient. Le phénomène préoccupe les journalistes et bon nombre d’ONG.

Comme en Europe, les citoyens et notamment les jeunes doivent être alertés sur les dangers de transmettre d’un clic tout message sans en avoir vérifié le contenu. En ce sens, sur les réseaux en Afrique on commence à voir apparaître des hashtags comme #ThinkBeforeSharing ou bien #VerifyThenSharing.

Sur le continent, une association veille au grain depuis 2012. Lentement mais sûrement, Africa Check a constitué ses équipes de journalistes et scientifiques pour vérifier les allégations des personnalités publiques.

Cet hôpital serait-il le plus grand d’Afrique ? Quel est exactement le volume de riz importé sur le continent ? Quel pourcentage de Nigérians manquent-ils d’eau potable ? Des thématiques très diverses sont ainsi analysées par une rédaction à Nairobi et d’autres au Sénégal, au Nigeria et en Afrique du Sud. Africa Check s’appuie sur ses lecteurs pour qu’ils présentent une affirmation faite par un politicien ou dans les médias comme fausse ou trompeuse. Elle recherche elle-même également les sujets de l’actualité où il faut démêler la réalité de la fiction. Les articles publiés sur son site Internet sont à la disposition des médias qui peuvent les reproduire. Les reporters de l’organisation interviennent également dans la presse écrite et audiovisuelle pour discuter de leurs conclusions.

Un réseau international

Cette initiative, portée initialement par la Fondation AFP, qui requiert du temps et de l’argent pour vérifier les informations, bénéficie du soutien de divers partenaires et bailleurs tels que des centres de formation de journalisme, l’International Press Institute, Google, le Concours d’Innovation en matière d’information de l’IPI, la Fondation Konrad Adenauer, le Millenium Trust ou la Bill & Melinda Gates Foundation… L’information sur ces financements est transparente. Et « nos partenaires acceptent eux aussi que nous puissions vérifier des informations les concernant » précise Vincent Ng’ethe, rédacteur en chef adjoint de la rédaction kényane.

Cette organisation définit ainsi sa mission : « Pour que la démocratie fonctionne, les personnalités publiques doivent être tenues pour responsables de leurs déclarations. Les affirmations qu’elles font doivent être vérifiées de manière transparente et impartiale. Africa Check est une organisation indépendante, non partisane qui vérifie les déclarations faites dans l’espace public en utilisant les compétences journalistiques et les preuves provenant des derniers outils en ligne, des lecteurs, des sources publiques, des experts, et en faisant la part des choses entre les faits et la fiction pour en publier les résultats. »

Africa Check est membre du réseau International Fact-Checking Network créé en 2015 dans le giron de Poynter, un institut de formation et d’innovation en matière de journalisme. Ce mois de juin, une nouvelle assemblée de fast-checkers s’est tenue à Rome. Des « décodeurs » de l’Europe et d’autres continents y participaient. On considère qu’il y a plus de 100 groupes de fact-checkers dans 40 pays, apparus peu à peu depuis 2003.

Louisette Gouverne, Nairobi juin 2018

Consulter : https://fr.africacheck.org

*Le continent africain comptera 660 millions d’habitants équipés d’un « téléphone intelligent » en 2020, soit le double qu’en 2016, prévoit le cabinet Deloitte dans une étude présentée à Dakar en avril 2018.

Légende photo : Vincent Ng’ethe , Africain Check Nairobi, expliquait combien il est primordial de vérifier les informations lors d’un débat le 25 juin ,  » les Fake news sont elles une menace pour la paix sociale ? »